Le concept de la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE), aujourd’hui défini comme une considération par l’entreprise des impacts sociaux et environnementaux de ses activités, a beaucoup évolué au fil du temps.
Il apparaît dans les années 1950-1960 aux Etats-Unis et se construit au fur et à mesure des évènements et des actions menées par différents acteurs (ONG, entreprises, consommateurs, auteurs ou Etats), de ce fait la perception de la RSE change et occupe une place de plus en plus significative dans les mentalités.
Le XXème siècle : construction et développement du concept
Le XXème siècle connait l’explosion des relations internationales, de la mondialisation, ainsi que l’industrialisation des pays. Ces tendances entraînent des changements sur les conditions des différents acteurs et leur perception au niveau social, économique et environnementale.
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1950-1960
Naissance du concept
Le New deal développe une politique de redistribution des ressources, des lois de protection syndicale et des programmes d’aide, notamment pour les travailleurs itinérants et les fermiers. Sa naissance est renforcée grâce à la publication d’ouvrages dédiés aux entreprises dans les années 1960. Howard R. Bowen est considéré par le monde académique comme étant le « père » de la RSE avec son ouvrage « Social Responsibilities of the Businessman » de 1953. Citons également « The Responsible Corporation », George Goyder (1961).
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1970-1980
Evolution du concept
Si Milton Friedman affirmait en 1970 que « la responsabilité d’une entreprise est d’augmenter son profit », le concept évolue et est développé par différents auteurs. Une définition du concept qui semble majeure et incontournable est celle développée par Carroll dans son ouvrage de 1979 « A Three-Dimensional Conceptual Model of Corporate Performance ». Son modèle de performance de l’entreprise reste un élément fondateur pour comprendre le concept de RSE aujourd’hui. Il proposa alors une définition qui inclue l’éventail des devoirs d’une entreprise envers la société. Ces devoirs peuvent être classés en quatre catégories : économique, légale, éthique et philanthropique.
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1980-2000
Extension du concept
Partant du postulat que la définition de Carroll n’était pas complète, Freeman en 1984 renouvèle le concept en ajoutant la notion de partie prenante. Cette notion absolument capitale ne cessera d’être reprise par la suite. Sa théorie identifie comme partie prenante « tout individu ou groupe d’individus qui peut affecter ou être affecté par la réalisation des objectifs organisationnels ». Il a pensé cette approche comme une philosophie, en effet ses travaux rentrent dans le domaine de l’éthique des affaires, l’objectif était de créer un cadre pour les managers pour les aider à gérer leur organisation de manière plus effective.
Après la définition fondamentalement économique de Carroll et l’addition des parties prenantes par Freeman, une notion capitale manquait encore au concept : la dimension environnementale. C’est en ajoutant cette dernière qu’Elkington développe en 1997 le concept de la « Triple Bottom Line ». Concept aussi connu sous l’appellation Triple P : People, Planet, Profit. L’idée derrière le concept de triple performance en français, est que le succès ou la santé d’une entreprise peut et doit être mesuré non seulement par ses résultats financiers mais aussi par sa performance éthique, sociale et environnementale.
Les organisations internationales s’emparent du concept de RSE
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1976
OCDE
L’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Economique) développe des principes directeurs à destination des entreprises multinationales.
Thèmes abordés : publication d’informations, emploi et relations professionnelles, environnement, lutte contre la corruption, intérêts des consommateurs, sciences et technologies, concurrence et fiscalité. -
1977
OIT
L’année suivante, en 1977, l’OIT (Organisation Internationale du Travail) rédige une déclaration tripartite sur les entreprises multinationales et leur politique sociale.
Thèmes abordés : liberté syndicale et négociation collective, travail forcé, travail des enfants, égalité et non-discrimination. -
1987
Rapport Brundtland, Commission mondiale sur l’Environnement et le Développement
Publication du rapport Brundtland par la Commission mondiale sur l’Environnement et le Développement, créée au sein des Nations Unies
C’est la première fois que le terme « développement durable » est défini. Il s’agit d’un « développement qui répond aux besoins des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs ». Malgré sa couverture médiatique très faible, ce rapport influence les comportements des acteurs à moyen terme.
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1987
Protocole de Montréal
Cet accord international contraignant visant l’interdiction des gaz nocifs pour la couche d'ozone, au premier rang desquels le CFC (chlorofluorocarbone), mérite d’être cité, car il représente le meilleur, si ce n’est le seul, exemple d’accord multilatéral réussi. Il a été signé par 24 pays et par la Communauté économique européenne en 1987 et sa signature a permis la récupération de la couche d’Ozone à l’endroit où s’était formé le trou.
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1992
Sommet de RIO
Dirigeants mondiaux, activistes et militants écologistes se rassemblent lors de la Conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement ou Sommet de Rio.
Devenu une référence historique, la conférence a placé le développement durable, un concept tout juste défini par le rapport Brundtland, comme la pierre angulaire des débats. Les nations comprennent l’interdépendance qui les lient à la planète, ainsi, à cette occasion des principes instaurent les droits des peuples au développement et mettent en avant leurs responsabilités envers la préservation de l’environnement. Le développement économique devient indissociable de la protection de l’environnement.
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1997
Protocole de Kyoto
En 1997, tous les signataires de la Convention de Rio se sont réunis d’urgence au Japon pour signer le protocole de Kyoto. L’objectif de cet accord international : lutter contre le réchauffement climatique et réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Les années 2000 apportent des solutions pratiques
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1997
Etablissement du Global Reporting Initiative (GRI)
Ce reporting développe les directives liées au développement durable et permet de souligner les performances économiques, environnementales et sociales, dans un premier temps des entreprises, puis des organisations gouvernementales ou non gouvernementales. Il est issu du rassemblement entre la Coalition for Environmentally Responsible Economies (CERES) et le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE).
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2000
Formation du Global Compact ou Pacte Mondial par l’ONU (Organisation des Nations Unies)
Le Pacte Mondial regroupe des entreprises, des associations, des organisations gouvernementales et non gouvernementales et des gouvernements qui se rassemblent autour de 10 principes universellement reconnus. « Ces principes fournissent un cadre d'engagement volontaire pour les organisations qui souhaitent faire progresser leur démarche de responsabilité sociétale. C’est la plus importante initiative internationale d’engagement volontaire en matière de développement durable, regroupant plus de 13 000 participants dans 170 pays. »
Thèmes abordés : Droits de l’Homme, normes du travail, environnement et lutte contre la corruption. -
2001
Publication d’un Livre vert par la Commission européenne
Dans ce texte la commission donne sa conception de la RSE, un an plus tard elle publie une communication qui formulera sa stratégie. Cet ouvrage reste une référence, et porte le débat au niveau international, il fournit des préconisations d’initiatives sociales et environnementales pour les entreprises.
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2002
Sommet mondial sur le développement durable ou Sommet de Johannesburg
Conférence organisée tous les dix ans par les Nations Unies, ce Sommet de la Terre rassemble une centaine de chefs d’Etats et 60 000 personnes dont des représentants d’ONG, des journalistes et des entreprises. Son objectif était d’établir le bilan du Sommet de la Terre de 1992 à Rio, ainsi que l’adoption d’un plan d’action en 153 articles.
Thèmes abordés : pauvreté, paupérisation, consommation, ressources naturelles et leur gestion, globalisation, ou encore Droits de l’Homme. -
2007
Principles for Responsible Management Education (PRME)
Le PRME est une initiative volontaire regroupant 650 signataires parmi les grandes écoles de commerce à travers le monde. Soutenue par les Nations Unies, elle a vocation à donner aux étudiants les outils et les connaissances en termes de RSO qui leur permettront d’opérer les changements nécessaires à l’évolution de la société.
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2007-2010
Grenelle Environnement
Il réunit des représentants de l’Etat, des collectivités locales, des ONG et des entreprises. Leur but était de faire émerger des actions en faveur de l’écologie, de l’environnement et de la biodiversité. En 2009 et 2010, deux lois dites « Grenelle I » et « Grenelle II » sont adoptées. Citons la Loi Grenelle 2009 (art. 55, Loi du 3 Août 2009) qui demande aux établissements de l’enseignement supérieur de mettre en place un plan vert.
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2010
Norme internationale ISO 26 000
La norme internationale ISO 26000 fournit des lignes directrices aux entreprises et aux organisations pour fonctionner de manière socialement responsable. Cette norme clarifie la notion de responsabilité sociétale, aide les entreprises et les organisations à traduire les principes en actes concrets et partage les meilleures pratiques en matière de responsabilité sociétale. Elle est publiée en 2010 suite à des négociations entre gouvernements, ONG, industrie, groupes de consommateurs et monde du travail.
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2015
les 17 Objectifs du Développement Durable (ODD)
En 2015, les Etats membres de l’Organisation des Nations Unies (ONU) approuvent la liste de 17 Objectifs du Développement Durable (ou ODD). Ils s’intègrent dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 qui est intitulé « Agenda 2030 ». Ils traitent de la pauvreté, de la protection de la planète et de l’amélioration du quotidien des populations dans le monde.
Dans un souci de communication, les 17 ODD sont simplifiés par les « 5P » : peuple, prospérité, planète, paix, partenariats.
Les Objectifs du Développement Durable s’imbriquent dans les thématiques de la RSO et guident les entreprises à mettre en œuvre un plan d’actions. Elles peuvent adapter ces objectifs à leur niveau pour contribuer au développement durable.